La Tunisie et le Maroc sont aujourd'hui confrontés à une crise hydraulique majeure qui se manifeste, d'une part par la raréfaction et la dégradation de la ressource, d'autre part par une compétition croissante entre les divers usages de l'eau (agricole, touristique, industriel et domestique). Remettant en cause la part prépondérante de l'agriculture dans l'utilisation des ressources en eau, cette crise a imposé une réorientation des politiques hydrauliques dès le début des années 1990. Dans le secteur agricole, la mise en uvre de nouveaux instruments juridiques et institutionnels, visant à promouvoir une gestion participative des ressources en eau au niveau local, constitue une des composantes les plus importantes de ces nouvelles politiques. S'appuyant sur les résultats d'enquêtes de terrain réalisées auprès des principaux acteurs de l'eau dans les régions du Gharb (Maroc) et de Zaghouan (Tunisie), cet article examine les changements socio-institutionnels qu'introduisent les nouvelles politiques hydrauliques au niveau local et analyse le rôle des nouveaux dispositifs de gestion de l'eau dans la consolidation ou la fragilisation des systèmes de production basés sur l'irrigation. Au-delà de la question de la pénurie, il montre que la crise hydraulique est avant tout une crise de la gestion sociale de l'eau, qui pose plus fondamentalement la question de la réorganisation des rapports entre public et privé et renvoie aux conditions d'une véritable autonomie des associations d'usagers, tant en matière de gestion de l'eau que d'insertion dans les filières amont et aval.
Tunisia and Morocco today are confronted with a major water crisis expressed, on the one hand, in the rarefaction and the contamination of the resource, on the other hand, in a growing competition between different water uses (agriculture, tourism, industry and human consumption). While calling into question the predominant position of the agricultural sector in the use of water resources, the crisis has imposed a reorientation of water policies since the early 1990’s. In the agricultural sector, the implementation of new legal and institutional measures, geared towards the promotion of participatory water management systems at a local level, represents one major component of these policies.
Based on the results of interviews conducted with the main water actors in the regions of Gharb (Morocco) and Zaghouan (Tunisia), this paper examines the socio-institutional changes introduced by new water policies and analyses the role of the new local water management arrangements in consolidating or undermining irrigation-based agricultural systems.
Beyond the water rarefaction issue, the paper shows that the water crisis is closely associated with a crisis of the social management of the resource, which raises the question of the reorganization of private/ public relationships, as well as that of the conditions of the autonomy of water users’ associations.
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