Pascal Quignard's prose, in particular in the Dernier royaume polyptic presents a singular appearance, a discontinuous form which Dominique Viart calls "syncopated", an elliptical form, fragmented, interrupted by silences. This is a study of the work of the voice, of the voices present in this work - of the plurality of voices, because cases of polyphony, through the evocation of earlier authors, are common in Quignard's writing. If one focuses on the way citation is handled, one notices that its contractual limits are rapidly abolished. This very specific way of managing the hypotexts belongs to an aesthetic of collection and recollection, which defines the type of fragmentation at work in Quignard's work. The motif of the list thus turns out, from this perspective, to be a focal point of Quignard's writing (inasmuch as the paring down of discourse organises its composition). The list, focal point and final extremity of fragmentation, reveals this double movement: one of abandoning syntax in order to move towards the simple juxtaposition of the words in the sentence, the other in the need to gather back in, to recompose, to struggle against collapse, to put in order. Lists of authors also, those Quignard surrounds himself with, copies, recycles, and with whom he chooses to incorporate himself, within a collective body, both multiple and unique.
La prose de Pascal Quignard, et plus particulièrement le polyptique Dernier royaume, présente un aspect singulier, une forme discontinue que Dominique Viart qualifie de " syncope ", une forme elliptique, fragmentée, entrecoupée de silences. Cet article se propose d'observer le travail de la voix, des voix présentes dans cette oeuvre - au pluriel, parce que les cas de polyphonie, via la convocation d'auteurs antérieurs, sont monnaie courante chez Quignard. En se penchant sur sa pratique de la citation, on remarque que les limites contractuelles de celle-ci sont très rapidement abolies. Cette gestion particulière de l'hypotexte participe d'une esthétique de la collection et de la recollection, définitoire du type de fragmentation à l'oeuvre chez Quignard. Le motif de la liste s'avère dans cette perspective un point focal de l'écriture quignardienne (dans la mesure où l'élagage du propos régit sa composition). La liste, point de mire et dernière extrémité de la fragmentation, révèle ce double mouvement : l'abandon des structures syntaxiques en direction d'une simple juxtaposition des termes de la phrase d'une part, et de l'autre le besoin de recollection, de recomposition, de lutte contre la débâcle, d'ordonnancement. Liste d'auteurs également, ceux dont Quignard s'entoure, qu'il recopie, réutilise et auxquels il choisit de s'agréger dans un corps collectif, à la fois multiple et unique.
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