Resumen de Déconnecter les sphères personnelle et professionnelle: un leurre clinique et politique
Il arrive régulièrement que les patients que nous recevons en consultation nous demandent de les aider à mieux «séparer leur vie professionnelle de leur vie personnelle». Ils souhaitent que nous les aidions «à tenir» en participant de l’érection d’un mur entre ces deux espaces. Ainsi la solution est-elle souvent toute trouvée; il s’agit de les outiller, de manière à ce qu’ils puissent «déconnecter» pour de ne pas être constamment envahis par leur travail. En somme, ils souhaiteraient que le travail cesse, pour le dire de manière triviale, de leur «pourrir la vie».Mais ces demandes nécessitent d’être approfondies dans le but de comprendre ce qui leur est sous-jacent. À partir de ce constat clinique, nous allons donc tenter de comprendre les raisons qui poussent un certain nombre de salariés à réclamer une plus grande scission entre leur vie privée et leur vie professionnelle, ce qui, in fine,peut se traduire par la revendication d’un «droit à la déconnexion». Bien souvent, ce vécu d’envahissement est mis en lien avec l’intronisation et l’utilisation massive des outils informatiques aujourd’hui dans le monde du travail. Mais cette idée nécessite un examen plus poussé pour ne pas rester à la surface du problème. De notre point de vue, il est important de conférer une place centrale à l’investigation du travail et de son organisation si nous voulons apporter un éclairage conséquent à cette question. C’est pourquoi nous partirons de l’instruction des rapports existant entre «la digitalisation du travail» et le vécu d’invasion, d’envahissement et d’empiètement du travail sur la sphère privée pour notre démonstration. Pour ce faire, et à partir du socle théorique et pratique de la psychodynamique du travail – discipline initiée par le Pr. Christophe Dejours (1), nous introduirons tout d’abord des éléments d’explicitation des liens existant entre le travail et la subjectivité humaine, avant d’aborder, dans un second temps, des éléments relatifs aux nouvelles formes d’organisation du travail.
