Argentina
Cette contribution propose une analyse des formes de l’hétérogénéité énonciative –montrée et constitutive– (Authier-Revuz, 1984) dans deux romans francophones contemporains : Après nous les nuages (Bruxelles, 2017) de Marc Meganck, et Belle merveille (Paris, 2017) de l’auteur haïtien James Noël, dans le but de mettre en évidence comment à partir des énoncés polyphoniques l’on construit un discours collectif sur la violence. Ces textes racontent des événements qui ont eu lieu récemment et où la violence provoque la mort, la peur, l’horreur et le chagrin. Dans les deux cas, le temps du récit se situe après les événements, c’est-à-dire une fois que les paysages urbains et naturels ont été modifiés par la violence. Face à ces images effrayantes, la voix narrative se démultiplie en raison d’une violence qui n’est pas individuelle, personnelle ou intime mais collective et plurielle, et qui touche une communauté tout entière. D’une part, Noël raconte une catastrophe, le tremblement de terre en Haïti en 2010, à travers une multitude de voix —des survivants et des témoins—, ainsi qu’à travers le narrateur appelé « Bernard » ; d’autre part, Meganck décrit les attentats déclenchés à Paris et à Bruxelles en 2015 et 2016, respectivement, en employant une voix anonyme qui retransmet ce qu’elle voit et entend dans les villes. Nous postulons ici que la polyphonie devient l’instrument esthétique pertinent pour aborder un sujet actuel, urgent et collectif. Dans les deux romans, la polyphonie ne sert pas de marqueur de distance par rapport à l’énoncé, mais sert à souligner le thème, car chaque voix ajoute son point de vue pour mettre l’emphase sur la manière de raconter la violence. Ainsi l’objectif de cette étude est-il d’analyser les traces de la polyphonie dans les deux romans aux niveaux syntaxique, lexical et typographique —des marques venant interférer le fil du discours sous la forme d’une autre langue, d’un autre interlocuteur ou d’un autre registre— en vue de distinguer les identités narratives (Ricoeur, 1990) qui assument le récit dans les deux romans. Pour ce faire, nous partons du concept de dialogisme développé par Bakhtine (1989) au moyen duquel l’auteur exprime que « la plurivocalité et le plurilinguisme pénètrent dans le roman de telle sorte qu’ils sont organisés dans un système artistique » (116). Nous identifierons également les différents je du discours et les façons de les nommer ; de même que l’usage de l’italique, des guillemets et du discours indirect libre. Chemin faisant, nous mettrons en évidence comment ces voix construisent un sens collectif sur la violence, et même à quel point il faut dire la violence à plusieurs voix pour pouvoir la supporter. C’est dans l’intention de mettre à jour les concepts de polyphonie, d’hétérogénéité énonciative et de narrateur/énonciateur que nous proposons une approche analytique dans la littérature francophone principalement contemporaine.
Cette contribution propose une analyse des formes de l’hétérogénéité énonciative –montrée et constitutive– (Authier-Revuz, 1984) dans deux romans francophones contemporains : Après nous les nuages (Bruxelles, 2017) de Marc Meganck, et Belle merveille (Paris, 2017) de l’auteur haïtien James Noël, dans le but de mettre en évidence comment à partir des énoncés polyphoniques l’on construit un discours collectif sur la violence. Ces textes racontent des événements qui ont eu lieu récemment et où la violence provoque la mort, la peur, l’horreur et le chagrin. Dans les deux cas, le temps du récit se situe après les événements, c’est-à-dire une fois que les paysages urbains et naturels ont été modifiés par la violence. Face à ces images effrayantes, la voix narrative se démultiplie en raison d’une violence qui n’est pas individuelle, personnelle ou intime mais collective et plurielle, et qui touche une communauté tout entière. D’une part, Noël raconte une catastrophe, le tremblement de terre en Haïti en 2010, à travers une multitude de voix —des survivants et des témoins—, ainsi qu’à travers le narrateur appelé « Bernard » ; d’autre part, Meganck décrit les attentats déclenchés à Paris et à Bruxelles en 2015 et 2016, respectivement, en employant une voix anonyme qui retransmet ce qu’elle voit et entend dans les villes. Nous postulons ici que la polyphonie devient l’instrument esthétique pertinent pour aborder un sujet actuel, urgent et collectif. Dans les deux romans, la polyphonie ne sert pas de marqueur de distance par rapport à l’énoncé, mais sert à souligner le thème, car chaque voix ajoute son point de vue pour mettre l’emphase sur la manière de raconter la violence. Ainsi l’objectif de cette étude est-il d’analyser les traces de la polyphonie dans les deux romans aux niveaux syntaxique, lexical et typographique —des marques venant interférer le fil du discours sous la forme d’une autre langue, d’un autre interlocuteur ou d’un autre registre— en vue de distinguer les identités narratives (Ricoeur, 1990) qui assument le récit dans les deux romans. Pour ce faire, nous partons du concept de dialogisme développé par Bakhtine (1989) au moyen duquel l’auteur exprime que « la plurivocalité et le plurilinguisme pénètrent dans le roman de telle sorte qu’ils sont organisés dans un système artistique » (116). Nous identifierons également les différents je du discours et les façons de les nommer ; de même que l’usage de l’italique, des guillemets et du discours indirect libre. Chemin faisant, nous mettrons en évidence comment ces voix construisent un sens collectif sur la violence, et même à quel point il faut dire la violence à plusieurs voix pour pouvoir la supporter. C’est dans l’intention de mettre à jour les concepts de polyphonie, d’hétérogénéité énonciative et de narrateur/énonciateur que nous proposons une approche analytique dans la littérature francophone principalement contemporaine.
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