Benjamin Gray, Antoine Heudre (trad.)
This paper applies to ancient Greece an approach developed by Pierre Rosanvallon: the integration of philosophical texts with the most everyday documents to better grasp a society’s understanding of its political life. For the ancient polis, this means focusing on the more prosaic evidence offered by cities’ inscriptions, especially their collective decisions published on stone. It is used here to consider the changing ideas about the nature of political and private life—and especially the space between them. In a very influential model, Classical Athenian democrats and philosophers tended to insist on a sharp binary distinction between public/political life and private life, leaving little room for a notion of an intermediate third space of polis life, similar to a “social sphere” or “civil society.” This pattern remained dominant in the Hellenistic and Roman periods, but, especially after c. 150 BC, some Greek citizens and intellectuals developed, above all in inscriptions, a much more explicit, complex, and subtle notion of “social life” as something between politics and private life. The article concludes by asking what the different ancient concepts discussed can contribute to current historiographical debates about the nature of the Greek city after c. 150 BC, especially when it comes to moving beyond the traditional picture of “depoliticization.” It also calls into question the orthodox narrative of the development of ideas of “the social” over many centuries up to the present.
Cet article applique à la Grèce antique une approche développée par Pierre Rosanvallon : l’intégration des textes philosophiques aux documents du quotidien pour mieux saisir la compréhension qu’une société a de sa vie politique. Ici, cela nécessite de se concentrer sur les sources plus pragmatiques que sont les inscriptions des villes, notamment celles portant sur les décisions civiques. Nous nous penchons sur l’évolution des idées sur la nature de la vie politique et privée, et surtout sur l’espace qui les sépare. Avec une influence considérable, les démocrates et les philosophes de l’Athènes classique ont eu tendance à insister sur une distinction binaire nette entre vie publique/politique et vie privée, laissant peu de place à la notion d’un troisième espace intermédiaire de la vie de la polis, semblable à une « sphère sociale » ou à une « société civile ». Ce modèle est resté dominant pendant les périodes hellénistique et romaine, mais, surtout après 150 av. J.-C. environ, certains citoyens et intellectuels grecs ont développé, principalement dans les inscriptions, une notion beaucoup plus explicite, complexe et subtile de « vie sociale », entre la politique et la vie privée. L’article s’interroge finalement sur ce que les différents concepts antiques discutés peuvent apporter aux débats historiographiques actuels sur la nature de la cité grecque après 150 av. J.-C., en particulier sur la manière de dépasser l’image traditionnelle de la « dépolitisation », et remet également en question le récit orthodoxe du développement des idées du « social » sur plusieurs siècles jusqu’à aujourd’hui.
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