Gillian Lane-Mercier, Denise Merkle, Reine Meylaerts
La notion de traduction institutionnelle a suscité beaucoup d’intérêt dernièrement, alors qu’elle génère la controverse en réponse à l’« ambiguity of the concept of institution » (Kang 2009 : 141) car les traductologues se réfèrent « either to translating in or for specific organizations » (Kang 2009 : 141). La recherche porte surtout sur la traduction institutionnelle comme « mostly centred on translation practice at large and important institutions » (Kang 2009 : 144), sans faire la part entre les contextes de langues officielles et de langues non officielles (p. ex. : Pym 2004), ou entre les contextes nationaux et internationaux (Koskinen 2008). De plus, « the concept is slowly but clearly being used as a means of understanding and studying translation practice in general » (Kang 2009 : 144), ce qui ajoute à l’ubiquité du terme. Un sous-domaine de la traduction institutionnelle qui pourrait aider à nuancer le sens et contribuer à la théorie est celui de « traduction officielle » dans deux contextes différents : national et international. Si le terme est également polysémique, son étendue est tout de même moindre que celle de traduction institutionnelle. Cependant, on retrouve rarement ce terme dans le domaine de la traductologie (à l’exception de l’identification des traductions certifiées ou notariées de documents officiels, p. ex. : certificat de naissance ou de décès, permis de conduire).
Une définition de traduction officielle qui pourrait s’avérer utile est inspirée de l’Organisation de coopération et développement économiques (OECD 2002) ; selon celle-ci, la traduction officielle se fait entre langues légiférées dans une entité politique (État, région, ville ou organisation internationale) constituée légalement. De plus, le terme pourrait s’appliquer aux types de textes (légaux ou administratifs, p. ex.) identifiés dans la législation sur les langues officielles. La recherche traductologique jusqu’à ce jour se penche sur les organisations internationales, notamment sur l’Union européenne, à l’exception de celle de Brian Mossop (1988 ; 1990), qui étudie le Bureau de la traduction du Canada. Plus de recherches sur les États officiellement plurilingues, la Belgique et le Canada étant les exemples le plus souvent cités, en plus des régions et des villes peuvent aider à comprendre la position et le rôle de la traduction et de l’interprétation dans ces régimes, ce qui définit leur politique respective de traduction et d’interprétation.
Une ville, une région ou un pays désigné officiellement plurilingue sera sans doute doté d’une législation sur les langues officielles, mais cette législation n’explicite pas toujours les droits en matière de traduction et d’interprétation. Par exemple, l’Acte constitutionnel du Canada (1867) exige la production de documents officiels dans les deux langues officielles du pays (l’anglais et le français), mais ne se réfère pas à la traduction. Comment l’État produira-t-il ainsi les documents dans les deux langues officielles ? Les documents seront-ils rédigés dans les deux langues ou va-t-on plutôt traduire les textes ? Si l’État décide de les faire traduire, quelles seront la langue de départ et la langue d’arrivée ? Pour des raisons historiques, une des langues officielles peut jouir de plus de prestige que l’autre langue au sein de l’État, même si cette dernière jouit du statut de langue majeure au-delà des frontières nationales. La langue officielle minoritaire sera vraisemblablement reléguée au statut de langue traduite.
Dans des contextes de langues officielles, il existe souvent une infrastructure, par exemple un service de traduction et d’interprétation officiel, ainsi qu’un système de formation des traducteurs qui peuvent y être embauchés. Les traducteurs y intégrés doivent généralement avoir suivi une formation standardisée et réussi un examen, en plus de répondre aux normes de sécurité. Des traducteurs officiels contribuent aux banques de terminologie qui normalisent les termes et aux mémoires de traduction qui uniformisent le style et l’usage, en plus de participer activement à l’aménagement linguistique. En outre, l’État peut exiger l’adhésion à une association professionnelle qui contrôle la profession.
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