Lublin, Polonia
L'article se propose d'analyser la dichotomie mémoire-oubli présente dans l'œuvre dramatique de Matéi Visniec, premièrement en se référant à l'opposition entre la belle mort et la mort contrariée, deuxièmement dans le contexte du passage du culte de la mémoire au culte de l'oubli, et troisièmement en examinant les manifestations des abus de la mémoire et de l'oubli dans la société d'aujourd'hui, dénoncés par l'auteur. L'analyse s'appuie sur la terminologie proposée par Jean-Pierre Vernant et Sébastien Rongier concernant la relation étroite qui s'articule entre la mort et la mémoire, et sur les réflexions de Paul Ricœur portant sur la typologie des abus de la mémoire et la question de la juste mémoire. Dans les pièces analysées, qui remémorent la guerre, la mort outrageante condamne le soldat à l'oubli. Les rites funéraires et la tombe qui permettent au mort d'entrer dans la mémoire collective deviennent ainsi de véritables instruments de commémoration. Visniec dénonce la banalisation de la mort dans la société de consommation qui contribue à déshumaniser l'homme, et l'indifférence envers le mal qui a transformé l'Europe en une poubelle à restes humains. L'analyse mène à la conclusion que les réflexions de Visniec concernant la mémoire et l'oubli se rapprochent de la philosophie de Ricœur, car il souligne l'importance du deuil et des remémorations dans la tradition européenne, de la mémoire qui permet de dénoncer le mal, et il prévient contre des abus néfastes à la mémoire collective et individuelle et par conséquent à la société et l'individu.
The objective of the paper is to analyse the memory-oblivion dichotomy present in the dramatic works of Matéi Visniec, first by referring to the opposition between beautiful death and desecrated death, second in the context of the transition from the cult of memory to the cult of oblivion, and third by examining the manifestations of the abuse of memory and oblivion in today's society, denounced by the author. The analysis is based on the terminology concerning the close relationship between death and memory proposed by Jean-Pierre Vernant and Sébastien Rongier, and on Paul Ricœur's reflections on the typology of the abuse of memory and the question of just memory. In the plays that are analysed, which recall the war, outrageous death condemns the soldier to oblivion. The funerary rites and the grave that allow the dead to enter the collective memory become true instruments of commemoration. Visniec denounces the trivialization of death in the consumer society that contributes to the dehumanization of human beings and indifference to the evil that has transformed Europe into a dustbin full of human remains. The analysis leads to the conclusion that Visniec's reflections on memory and oblivion are close to Ricœur's philosophy, because he emphasizes the importance of mourning and remembrance in the European tradition, and of the memory that allows us to denounce evil and provides protection against harmful abuses to the collective and individual memory and consequently to the society and individuals.
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